24/10/2017
24 octobre 1917
"Ma chère fille,
En voyant cette aimable binette, tu voudras bien me plaindre un peu plus. Que je sois obligé de faire la guerre c'est déjà très dommageable à ma douce santé, mon cœur (de part votre faute) saigne douloureusement. Mais que ma vue si délicate soit offensée de pareilles visions, c'en est trop. Certes Darwin avait fait son voyage en Allemagne alors qu'il formulait son affirmation sur l'origine du bipède ci-présent.
Triste guerre, où l'homme se bat contre le singe, allez donc vous étonner après cela, infortunés Poilus, si vous en mangez si souvent! Mais vraiment ce ne peut être de la même espèce car certes nous serions empoisonnés.
Je n'ai qu'une peur, c'est que des profondeurs de la terre (j'aurais pu dire De profundis, ça aurait été plus court) ils ne ressuscitent, et que nous les retrouvions dans l'après guerre accrochés à nos grands arbres, toujours aussi grimaçants, aussi malfaisants. Si l'on voulait m'en croire, on laisserait faire les Américains, gens pratiques. Ceux-ci, en leur soufflant l'idée, n'hésiteraient pas un seul instant à les accommoder en viandes de conserve, la mise en boîte serait de rigueur et après la guerre on les passerait aux jeunes boches affamés. Nous ferions des bénéfices appréciables car ils sont gros mangeurs. Et enfin on pourrait vendre sur le nom véritable de singe de conserve.
Quoi! Ne criez pas au scandale, n'est-ce pas aux pères à nourrir les enfants?
Donc je suis moral, je suis pratique par dessus le marché.
Au revoir ma chère Raymonde
et surtout conserve ton calme,
ma folie est très douce."
prochaine note : 2 novembre 2017
06:00 | Tags : poilus, tranchées, champagne, grande guerre, 1914-1918 | Lien permanent | Commentaires (0)
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