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12/09/2015

12 septembre 1915

Huit heures - Route Marchand - Four de Paris.

En voulant dater ma lettre, je viens de m’apercevoir que le soleil radieux qui se lève ce matin éclaire un Dimanche et un peu plus de regret emplit mon cœur. En une rapide vision j’ai vu notre réunion familiale dans notre petit verger puis j’ai senti le cruel destin qui me fixait à ce poste pénible par ce fait qu’il me sépare de vous.

Dans ta lettre d’hier, tu me dis tes inquiétudes à la lecture des journaux qui émettent des hypothèses quant à la durée de la guerre. Sache bien que tous les États  “bluffent” à qui mieux mieux ; chacun affirme sa volonté de manger l’adversaire et de tenir indéfiniment ; mais au fond tous désirent un résultat heureux à bref délai.

Cependant l'Allemagne doit être vaincue et elle le sera, mais comme je l’ai écrit il y a un an et comme je l’ai toujours soutenu, ce sera rude ; l’Allemagne, c’est tout ce qu’il y a d’Allemands en Europe ( 120 millions d’habitants) et cela donne des soldats et encore des soldats... Si ces soldats sont une force, ce grand peuple mangeant au même râtelier est sa faiblesse vivant sur lui-même.

L’écroulement viendra donc dès qu’une victoire un peu sérieuse aura été obtenue sur un front. Mais perdus pour perdus, ils veulent se battre le plus longtemps possible espérant toujours une défaillance de notre part. Cette défaillance, nous ne l’aurons pas, car notre esclavage en serait la conséquence ; et puis nous devons penser à nos  morts, qui ne se sont pas  fait tuer pour un résultat pitoyable.
Soyons donc calmes, souffrons... mais ne désespérons pas.

prochaine note: 14 septembre

10/09/2015

10 septembre 1915

En ligne - Sortis ce matin de notre taupinière, nous faisons la conversation avec Le Cor tout en fourbissant la petite bague serpent ; si c’est “bébête” cela fait passer le temps et le serpent détruit le cafard.


La canonnade devient violente ; le 30ème ayant perdu pas mal de monde, des auxiliaires dressés à l’arrière viennent d’arriver en renfort. Jamais je n’ai vu le soldat français si bien habillé ; on a dû faire un prélèvement sérieux à la Banque de France ; quoique nos effets à nous, hommes du front, soient suffisamment bons, nous semblons tout de même de deuxième zone à côté de ces recrues.
Vous ai-je dit que nous avons enfin un casque ?


Cela nous donne un air épatant ; enfoncée la cavalerie :dragons, cuirassiers... désormais, nous sommes une troupe d’élite. Mais plaisanterie à part, cette coiffure protège des petits éclats d’obus avec assez de succès. Enfin tout est bien et si la guerre dure encore cinq ou six ans, noua serons parfaitement outillés.


prochaine note: 12 septembre

09/09/2015

9 septembre 1915

Je suis dans un joli petit poste aux avancées ; la nuit est là “calme et tranquille” comme  eut dit le poète ; la canonnade maintenant fait partie des bruits naturels; on ne la distingue plus.

prochaine note: 10 septembre

 

04/09/2015

4 septembre 1915

Je reçois un colis de confitures accompagné de chaussettes. Ces dernières, mal protégées, sont totalement enrobées de sirop de prunes; je ne sais si cela m’imperméabilisera les pieds... A l'avenir, continuez l’envoi des prunes et supprimez les chaussettes.

prochaine note: 9 septembre

01/09/2015

1er septembre 1915

Difficulté de vous écrire : j’ai pris et repris ma lettre trois ou quatre fois ; entrant et sortant de mon terrier, nous sommes furieusement bombardés ; néanmoins je reste le plus possible dehors car j’ai horreur du noir et de l’humidité ; mais si j’écris peu, je pense beaucoup :
C’est sous un marmitage intense que l’on “pense” le plus sans rien dire, mais c’est dans le calme parfait que l’on parle le plus sans “penser”.
Saura-t-on jamais combien dans cette guerre se sont fait tuer pour un rayon de soleil ???? Pouvant sommeiller tranquilles au fond de leur noir gourbi, ils ont été fauchés par un éclat de torpille parce qu’ils voulaient voir un peu plus longtemps la lumière.”

prochaine note: 4 septembre

31/08/2015

31 août 1915 (2ème lettre)

Vous avez été tous satisfaits des petits envois de mes bagues d’aluminium faites à votre attention. Tu me dis qu’elles restent particulièrement brillantes ; ceci tient à ce qu’au début les Allemands ont employé le métal pur et qu’aujourd’hui ils le mélangent ; cet alliage est d’aspect mat et a le défaut de noircir avec le temps. Mais nous ne pouvons guère le leur reprocher car ils ne nous l’avaient pas envoyé pour faire de la bijouterie.

prochaine note: 1er septembre