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07/05/2015

7 mai 1915

Vendredi 7 Mai 15

Ma chère Hélène,

Par quoi dois-je commencer - tant et tant de choses ont passé devant mes yeux. Cependant c'est encore votre souvenir qui est le plus en ma mémoire, aussi je commencerai par vous adresser mes plus chères amitiés. Ici face à l'ennemi, certes la vie manque de confort mais je l'ai tant désiré que j'aurais mauvaise grâce à m'en plaindre, et puis plus le spectacle est corsé plus chères sont les places, ainsi je vous noterai en passant les reconnaissances d'avions français faits au-dessus des lignes ennemies pendant près de deux heures, hier au crépuscule, alors que les canons allemands fous les bombardaient fiévreusement autant qu'inutilement.

Puis j'ai assisté à un salut du mois de Mai comme certes vous n'en vites jamais. La Petite Église de Brabant en Argonne dans son petit cimetière, seule dans toute la campagne, laissait entendre le bruit des cantiques chantés par deux ou trois cents hommes et de temps en temps le canon mettait son point d'orgue. Je ne puis vous dire tout ce que je désirerai car cela est rigoureusement interdit. Sachez cependant que je suis aussi bien placé que possible et que malgré cela mes chers amis et même Chauveau n'auront rien à me reprocher. Tout de même je préfère garder la France plutôt que la Chambre des Députés. Je prendrai ici ma part de gloire et vous pourrez regarder fièrement les maris et les papas (d')embusqués. Ainsi je continue à vous protéger et j'en suis très heureux. Le Cor est mon voisin donc la bande est complète. J'ai aussi près de moi le garçon qui connait Maitre Dieu (Ardouin). Au point de vue matériel la nourriture est très suffisante. A part le vin et le café il est à peu près impossible de se procurer autre chose. J'ai passé (j'oubliais de te le dire) à Suippes, tu peux dire à ta concierge qu'il reste encore quelques maisons vues du chemin de fer.

Ne soyez pas inquiètes si vous ne recevez pas de nouvelles pendant quelques jours, mais je ne pourrais sans doute pas écrire avant une huitaine. Dès que ce sera possible je m'en ferai un devoir.

J'embrasse bien fort Mammonde et lui recommande de me faire oublier pendant ces quelques temps en se multipliant en amabilités et en travail; je sais que cela lui est facile. Quant à toi ma chère Hélène, j'espère que tu as repris tout ton courage et vas te montrer fière et résolue comme il convient à celle que j'ai choisi.

Je vous embrasse de tout cœur.

Basin

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 Prochaine note: 10 mai

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