Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

23/12/2017

23 décembre 1917

Nous revoilà dans la dure période des longues nuits et du froid : bourrasques de neige, pas d’abris ; d’affreux petits gourbis dans un sol complètement détrempé, nous sommes très, très mal...
Nous n’avons pas d’eau... et pour faire le jus que l’on ne peut aller chercher à l’arrière, nous avons été obligés de ramasser la neige dans un vieux récipient afin d’en obtenir un peu de liquide. Je souffre surtout du froid aux pieds...
Quatrième hiver de misère... et pendant qu'ici nous luttons dans la souffrance, des gens à l’arrière trahissent...
Au front, l’espoir des poilus est en Clémenceau qui fait figure de chef ; je crois qu’il n’aura peur d’aucun député ni sénateur défaitiste. Pour moi, j’ai grande confiance en lui, c’est à peu près le seul homme qui montre du courage en paroles et en action.

prochaine note : 6 janvier 2018

 

05/12/2017

5 décembre 1917

poème1.jpg

poème2.jpg

(poème du sergent Le Pladec, fonds Félix Basin)

La bague

Il a quitté depuis ce matin la tranchée

Lavé dans le ruisseau sa capote tachée

De vert tendre et de jaune aux parois des boyaux

Nettoyé son fusil rouillé dans les créneaux.

Puis, heureux de se voir pour quelques heures libres

Par ce matin d'octobre, en la forêt qui vibre

A l'infini, semant sa feuille au gré du vent

Il veut travailler seul et s'exile en rêvant.

Il coula l'autre soir dans un moule de pierre

La tête d'un obus tombé sur la carrière

Sous les doigts patients du soldat de chauffour

L'engin va se changer en un gage d'amour

Pendant que vers Soissons, là-bas, gronde un bruit vague

De canonnade, il va ciseler une bague

Dans ce métal qu'hier a vomi le canon.

L'artiste, car on peut l'appeler de ce nom

Se met de tout son cœur à ce charmant ouvrage

Qui s'orne, sous ses doigts, de fleurs et de feuillages.

C'est un arbre où s'enroule un tout petit serpent

Une branche, un bouquet de cerises qui pend

Ou bien un lys penchant doucement sa corolle.

Un cœur sur le chaton, mieux que toute parole,

Saura dire à l'épouse ayant reçu sa foi,

Là-bas dans notre bijou : "Je t'aime et pense à toi!

C'est pour toi que j'ai fait cette chose jolie,

C'est pour toi qu'avec tant de soin je l'ai polie,

Et je veux qu'à ton doigt tu la portes toujours,

Sur l'alliance d'or de nos chères amours.

Cet anneau, c'est un peu de moi que je t'adresse.

Je veux que le dimanche, en sortant de la messe,

Tu le montres, le front de bonheur rougissant,

En disant aux amis : "C'est de mon cher absent!"

Lorsque tu trouveras l'heure plus triste encore,

Que les pleurs dans tes yeux seront tout près d'éclore

Et que d'attendre en vain ton cher cœur sera las,

Ma bague te dira que ton soldat, là-bas,

Ne veut pas que tu pleures et te crie : Patience

Sois courageuse et forte encore... pour la France!"

 

prochaine note : 23 décembre 2017