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13/05/2015

13 mai 1915

4 h. du matin -
Je reviens d’un petit poste au-delà de ma tranchée avec trois hommes. Oh les belles émotions ... Pensez : avoir au bout de son fusil, l’ennemi, dans la nuit et puis, à droite, à gauche, la canonnade : éclairs, projectiles ; et à part ces bruits, pas un son humain...
On serre bien fort son fusil et ... rien ne vient.
Alors les deux heures sont passées et on cède sa place : le devoir est accompli ; c’est plus facile qu’on ne se l’imagine et beaucoup moins dangereux.
J’oubliai de vous mentionner : hier au soir, nous avons dîné par cœur, les voitures ne pouvant venir que la nuit; mais aujourd’hui, nous ferons ripaille.
Hier soir, nous assistions à un bombardement formidable de ce qui reste du Vauquois (un Mont Pelé).
Je suis descendu chercher de l’eau au village d’Avocourt (photo) ; jamais vous n’avez vu pareille désolation : pas une maison debout sur 250 environ ; seule, près de l’Église, une fontaine “Calvaire” a trouvé grâce et l’effet est saisissant de voir les bras tendus de Celui qui avait prêché la paix parmi les hommes.

 

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La nuit et le jour sont pour nous une continuité de temps partagée par les heures de veille et de repos ; soldats à part, on ne voit pas un être humain ; on ne se déshabille jamais ; on se faufile sous terre sur une vague paille pilée et moisie ; on mange à la manière des premiers hommes; nous revoilà à l’âge préhistorique.
Heureusement, le temps est magnifique. Je vais bien, je suis calme et je viens de faire ma barbe entre deux créneaux pendant le bombardement des avions.

Prochaine note: 17 mai

10/05/2015

10 mai 1915

Eh bien voilà, ma première nuit aux petits postes est passée. Beaucoup de fatigue et de peine pour y arriver ; mais aucune émotion de ma part ; je suis convaincu maintenant que si l’émoi doit me prendre, ce sera après le coup reçu, avant : rien à faire.

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Nous sommes en tranchée de 1ère ligne pour six jours sans aucune relève ; les canonnades d’avions sont constantes, c’est très intéressant. Inutile de penser, je crois, à une offensive sur notre front ; les défenses y sont formidables. Attendons les diversions qui viendront certainement.
Je vous prie de n’avoir aucune inquiétude à mon sujet. Je vous souhaite tout le calme dont nous manquons ici ; ma santé est parfaite, je ne souffre que du manque de sommeil ; aussi, dès que je trouve une pierre hospitalière, à toute heure du jour, je m’offre cinq minutes de “roupillon”. Donnez le bonjour à tous les amis de ma part ; dites-leur bien tout ce qu’ils perdent en n’étant pas avec nous.
J’aurai des choses gaies à vous conter en rentrant ; que de bonnes blagues. J’attends avec impatience une lettre de vous, cela, je pense, m’arrivera encore quelquefois.

Prochaine note: 13 mai

 

07/05/2015

7 mai 1915

Vendredi 7 Mai 15

Ma chère Hélène,

Par quoi dois-je commencer - tant et tant de choses ont passé devant mes yeux. Cependant c'est encore votre souvenir qui est le plus en ma mémoire, aussi je commencerai par vous adresser mes plus chères amitiés. Ici face à l'ennemi, certes la vie manque de confort mais je l'ai tant désiré que j'aurais mauvaise grâce à m'en plaindre, et puis plus le spectacle est corsé plus chères sont les places, ainsi je vous noterai en passant les reconnaissances d'avions français faits au-dessus des lignes ennemies pendant près de deux heures, hier au crépuscule, alors que les canons allemands fous les bombardaient fiévreusement autant qu'inutilement.

Puis j'ai assisté à un salut du mois de Mai comme certes vous n'en vites jamais. La Petite Église de Brabant en Argonne dans son petit cimetière, seule dans toute la campagne, laissait entendre le bruit des cantiques chantés par deux ou trois cents hommes et de temps en temps le canon mettait son point d'orgue. Je ne puis vous dire tout ce que je désirerai car cela est rigoureusement interdit. Sachez cependant que je suis aussi bien placé que possible et que malgré cela mes chers amis et même Chauveau n'auront rien à me reprocher. Tout de même je préfère garder la France plutôt que la Chambre des Députés. Je prendrai ici ma part de gloire et vous pourrez regarder fièrement les maris et les papas (d')embusqués. Ainsi je continue à vous protéger et j'en suis très heureux. Le Cor est mon voisin donc la bande est complète. J'ai aussi près de moi le garçon qui connait Maitre Dieu (Ardouin). Au point de vue matériel la nourriture est très suffisante. A part le vin et le café il est à peu près impossible de se procurer autre chose. J'ai passé (j'oubliais de te le dire) à Suippes, tu peux dire à ta concierge qu'il reste encore quelques maisons vues du chemin de fer.

Ne soyez pas inquiètes si vous ne recevez pas de nouvelles pendant quelques jours, mais je ne pourrais sans doute pas écrire avant une huitaine. Dès que ce sera possible je m'en ferai un devoir.

J'embrasse bien fort Mammonde et lui recommande de me faire oublier pendant ces quelques temps en se multipliant en amabilités et en travail; je sais que cela lui est facile. Quant à toi ma chère Hélène, j'espère que tu as repris tout ton courage et vas te montrer fière et résolue comme il convient à celle que j'ai choisi.

Je vous embrasse de tout cœur.

Basin

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 Prochaine note: 10 mai

05/05/2015

5 mai 1915


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De Mardi 4 à Mercredi 5 Mai, Nixeville, Argonne

Ma chère Hélène,

Dans la nuit nous sommes arrivés par une tourmente de grêle énorme dans les rues du petit pays - Nixeville (Gare Balecourt).

Ce matin 6h, repos; j'ai trouvé une charmante demoiselle qui veut bien me préparer un café au lait et fait signe à la bande. Le Cor est avec nous. J'espère que votre petite existence a repris son calme. J'ai cependant été attristé et tout de même heureux de ta petite défaillance.

Tout cela passera et nous nous retrouverons encore plus unis si possible. Je vais attendre pour mettre à cette carte quelques détails.

12h près V… Entendons le canon, enfin je crois à la guerre, heureusement avec mon scepticisme j'aurais tout nié.

On enlève les lettres; je tiens à vous passer celle-ci, j'en écrirai d'avantage à la première occasion.

Écrivez au 30ème secteur 129, 1ère Compagnie.

Je vous embrasse bien fort.

Basin

 

Prochaine note: 7 mai

04/05/2015

4 mai 1915

Il paraît que le jour de gloire est arrivé...
Départ Gare d’Aubervilliers Villette : Rien que des premières, pas de retour.. Destination inconnue mais soupçonnée ; je n’ai aucune inquiétude, mais un grand désir de liberté.., la caserne ne me vaut rien.
Avons laissé le camarade Chartier jouant de la clarinette à la caserne de la Pépinière (à quoi sert le piston...)

 

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 Prochaine note: 5 mai